Mémoire

L’illusion d’avoir bien appris

Ecrit par Jean-Yves Ponce

Avoir bien appris

Est-ce que vous avez déjà eu l’impression d’avoir bien appris quelque chose, mais de vous rendre compte un peu plus tard qu’en fait vous n’avez absolument rien retenu ?

Le résultat, c’est une grosse frustration (« pourtant je le savais ça !! »), une incompréhension suivie d’une déprime où vous vous dites : « je ne retiens rien ».

Il y a quelques temps, j’avais écrit un article : comment être sur d’avoir bien mémorisé. Aujourd’hui, je souhaite le compléter avec deux autres observations.

L’illusion d’avoir bien appris quelque chose alors qu’en fait vous n’avez rien retenu est un piège classique dans lequel je suis tombé durant toute ma scolarité. Pour ne plus être victime de cette illusion de savoir, vous devez faire attention à deux choses :

1- Avoir bien appris : Evitez de trop souligner/surligner

Je connais beaucoup d’étudiants qui soulignent énormément de choses. Leurs cahiers ou leurs fiches sont intégralement surlignés ou soulignés comme si tout était important. Comme s’il ne fallait rien oublier.

Je vois également cela dans mon boulot tous les jours. Pour vous donner un exemple, il m’arrive souvent de prendre un livre de théorie sur une étagère de la bibliothèque et me rendre compte que des pages entières sont soulignées.

Quand vous soulignez (ou surlignez) vous envoyez à votre cerveau le message que quelque chose est important et mérite d’être retenu. L’ennui c’est que si vous le faites trop fréquemment, il n’y a plus d’informations qui se détachent du reste. Il n’y a plus d’informations importantes pour votre cerveau. Au même moment, vous avez l’impression que vous apprenez car vous surlignez/soulignez.

Ce n’est malheureusement qu’une impression. En réalité, cette méthode n’est pas efficace et ralentit votre apprentissage, car dans les vrais tests, vous êtes victime du syndrome « trou noir » sans savoir exactement pourquoi.

avoir bien appris
Un texte trop souligné ne met rien en avant

Dans la mesure du possible, si vous devez mettre en avant quelque chose d’important, privilégiez plutôt la réécriture synthétique sur papier sous forme de mots clés ou bien le découpage de votre cours en morceaux. Je dis bien sur papier, car comme vous le savez, écrire sur papier vous permet de mieux mémoriser.

Pour une mémorisation optimale, pensez à mémoriser des mots clés importants de votre cours/texte. Ceux qui reviennent souvent ou ceux qui désignent une notion importante à retenir. Si vous en avez vraiment beaucoup, n’hésitez pas à les replacer dans un voyage (comme indiqué dans NJCB) ou à les associer à des choses loufoques mais mémorables (comme dans le secret d’une bonne mémoire).

2- Testez vos connaissances

L’autre piège est de penser avoir compris quelque chose sans l’avoir vraiment expérimenté. Vous lisez et vous comprenez votre cours. Puis vient le temps des exercices. Vous lisez la réponse et vous vous dites « facile cela, je le savais ».

Tout est facile une fois que la solution est devant vos yeux, mais la vérité c’est que si vous ne testez pas vos connaissances avec un vrai challenge, vous empêchez votre cerveau de rentrer en mode « concentration ».

Votre cerveau absorbe l’information mais ne se « muscle pas ». Il ne réfléchit pas. Si en plus ce que vous apprenez n’est pas passionnant, alors vous l’oublierez très vite…. Alors que vous pensiez le maîtriser, et ça, c’est très frustrant !

Comment vaincre cette illusion ?

La meilleure façon de vaincre cette illusion est de vous tester et de faire des exercices. Ceux des livres, ceux présents dans les études de cas, les annales, les bouquins de concours, ou tout simplement ceux que l’on vous donne (si si, ils ont une vraie utilité je vous assure).

Les plus complexes en particulier sont d’excellents tests pour voir si vous avez compris votre sujet. Ils forcent votre cerveau à fonctionner à plein régime en mode concentration. Une période de repos où vous faites autre chose après avoir bien réfléchi est également bénéfique pour votre mémorisation.

L’étape d’après est de vous exercer à enseigner à un ami ce que vous avez appris (et maitrisé avec les exercices). Enseigner à un néophyte, c’est la marque suprême de ceux qui maitrisent leur sujet. Je parlais de ce point particulièrement dans le défi 3 de la série « devenez plus intelligent »

Ces deux techniques servent à lutter contre l’illusion d’avoir appris. Avez-vous déjà été victime de cette impression ? Si oui, comment l’avez vous combattue ?

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10 Commentaires

  • Bonjour Jean-Yves 🙂

    Super, ton article. J’ai vu ça souvent avec mes élèves, dans des cours de maths; l’illusion dominante, c’est « J’ai compris à peu près ». Là, on pose une ou deux questions précises et … plus personne.

    Alors les exercices ? oui, bien sûr : en maths, c’est incontournable. Mais il y a encore une illusion très répandue; c’est le célèbre : « C’est pas grave, c’était une erreur d’étourderie ! ». On creuse trois secondes, et on s’aperçoit que les « erreurs d’étourderie » viennent de notions vraiment pas comprises. Illusion d’avoir bien appris, et aussi illusion d’avoir compris…

    En dessous de tout ça, il y a beaucoup de peurs : peur d’échouer, peur de l’image qu’on aurait de soi si on échoue (comme tu le dis dans Synapse), conscience à un certain niveau de soi qu’il y a en réalité beaucoup de choses qui ne sont pas claires du tout. Tout cela accompagné d’un discours dévalorisant pour soi et pour les autres (« je suis nul » ; « le prof est nul »), de pessimisme exprimé (« je n’y arriverai jamais ») et refoulé (« ma vie va être moche, je, je ne pourrai pas faire ce que je veux »).

    Quand il y a tout cela en-dessous d’une attitude apparemment « cool », on comprend mieux pourquoi les élèves en difficulté en maths « n’aiment pas » cette matière.

    Ce genre de ressenti (et ses conséquences) est valable aussi dans bien d’autres domaines, pas seulement scolaires d’ailleurs : en fait, chaque fois qu’on « n’aime pas » quelque chose, c’est qu’il y a des émotions douloureuses en dessous…. Et on se raconte n’importe quoi, en surface, pour ne pas être en contact avec elles.

  • Sympa cette article ! C’est marrant, mais je n’avais jamais pensé au syndrome du sur-lignage excessif. Le principe est simple pourtant…
    Et effectivement, tester ses connaissances c’est primordial. On ne peut pas enregistrer durablement quelque chose qu’on n’utilise jamais. Le cerveau fini par se dire « puisqu’il ne veut pas s’en servir, ça ne me sert à rien de le stocker… Allez, j’oublie » ^^

  • Bien vu, le sujet est intéressent et est une suite de se que tu nous apprend ces dernières semaine surtout le truc de peur de l’image qu’on aurait de soi si on échoue, donner l’impression au prof, aux amis qu’on a compris alors que c’est une illusion et en réalité c’est faux
    L’exemple des Maths est une très bonne preuve à l’appui !
    Personnellement quand je lis un livre ( Maktoub de Cohelo) à titre d’exemple je souligne ce que j’ai envie d’apprendre et pour cela je revient souvent vers ces ligne pour les relire et rafraîchir ma mémoire

  • Hello!

    Je me souviens être restée perplexe devant les livres presque entièrement surlignés de ma sœur il y a quelques années. Surtout que le fluo (ou moins grave le crayon à papier) sur les livres, je trouve ça un peu triste! Mais je pense que c’est une façon (erronée) de se rassurer et une difficulté à faire un choix entre ce qui est important et ce qui l’est moins.

    Je rencontre aussi cette difficulté (de choix) lorsque je prend des notes sur un support fixe (livre ou vidéo enregistrée). Je suis plutôt adepte des notes minimalistes (avec gribouillage dans la marge si c’est sur papier) à la base mais j’ai parfois des envies de TOUT noter que j’essaie de maîtriser en me disant que si je note trop au final j’en retiendrai probablement moins. Tu me confirmes mon point de vue. Bon la recherche du « juste notage » reste une tâche ardue, je trouve! (D’ailleurs si tu as des astuces!)

    Et pour ton second point, je trouve que la difficulté d’apprendre vient parfois du fait que, une fois sorti des études, il n’existe pas toujours d’exercices tout prêt pour se tester et il nous faut alors inventer ses propres tests. D’ailleurs, je crois qu’on se rendait pas assez compte de la chance qu’on avait d’avoir nos livres d’exercices quand on était plus jeune! ^^

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